Arménie : l’exemple d’une grève victorieuse des mineurs

Le 31 janvier, une grève éclate dans l’une des plus grandes entreprises minières de molybdène au monde. Les 4 000 ouvriers de la ZCMC, un géant minier et quatrième employeur d’Arménie, ont entamé un mouvement de grève sur le site de production de Qadjaran. Dans un contexte de crise économique aggravée, marqué par des conditions de travail difficiles et des taux de cancer alarmants dans la région, les ouvriers réclamaient une augmentation de 50 % de leurs salaires. Les employés dénoncent notamment l’écart salarial entre les cadres de l’entreprise, qui gagnent dix fois plus et roulent en voitures de luxe, et les leurs, qui leur permettent à peine de subvenir aux besoins élémentaires de leurs familles.

Le molybdène, un métal rare essentiel à la fabrication d’acier ultra-résistant, est une ressource stratégique. Il se trouve que 7 % des ressources mondiales de ce métal sont situées à Syuniq, une petite région montagneuse au sud de l’Arménie. Le site minier de Qadjaran revêt une importance cruciale, tant pour la région que pour le monde entier. De nombreuses entreprises internationales ont acquis des parts dans les mines arméniennes. Comme dans de nombreux pays sous l’emprise de l’impérialisme, les seules industries développées en Arménie sont celles qui permettent aux géants impérialistes de s’accaparer les ressources naturelles du pays, en exploitant une main-d’œuvre bon marché, en bénéficiant de faibles taxes et en laissant derrière eux un désastre écologique et humain.

À l’époque soviétique, la ZCMC était une entreprise d’État. Après la désindustrialisation du pays suite à la chute de l’URSS, l’entreprise est tombée entre les mains de la clique des anciens présidents compradores, Robert Kotcharyan et Serzh Sargsyan. En 2004, l’entreprise a été privatisée à 60 % pour une somme dérisoire au profit du géant allemand « Cronimet ». Après le mouvement populaire révolutionnaire de 2018 et l’arrivée au pouvoir de Nikol Pashinyan, les parts de Cronimet ont été rachetées par le milliardaire russe Roman Trotsenko. Ce dernier a cédé 22 % des parts à l’État arménien en échange d’accords privilégiés avec le gouvernement, lui permettant d’établir un monopole sur l’industrie minière en Arménie.

Cette grève est particulièrement intéressante à analyser, car elle met en lumière les contradictions profondes du pays et du système mondial. Elle a démasqué les révisionnistes de la Confédération des Syndicats d’Arménie, qui se sont empressés de dénoncer l’illégalité de la grève. Elle a également révélé la duplicité du gouvernement de Nikol Pashinyan, qui se prétend issu du peuple mais a appelé les ouvriers à reprendre le travail. Enfin, les dirigeants de l’entreprise ont eu recours à des tactiques indignes pour briser la grève, allant jusqu’à menacer de remplacer les ouvriers de Qadjaran par une main-d’œuvre immigrée venue d’Inde ou du Tadjikistan.

Après plusieurs jours de grève, et une reconduction de ma grève votée à la majorité, les employés ont obtenu une augmentation de 20 % de leurs salaires ainsi que des promesses d’amélioration des conditions de travail. Cependant, ces gains restent insuffisants et en deçà des revendications initiales. Les ouvriers demandent l’annulation des licenciements de huit de leurs camarades grévistes et la tenue des promesses.

Les prolétaires à travers le monde constituent une seule et même classe, confrontée aux mêmes injustices et aux mêmes combats. Tant que l’impérialisme ne sera pas chassé d’Arménie, l’émancipation totale des ouvriers arméniens ne sera pas possible. Les travailleurs de la ZCMC démontrent une fois de plus que pour triompher la classe ouvrière ne peut compter que sur la lutte.

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