Paris : Légionellose dans la cité, face à une bactérie mortelle, l’OPHLM laisse crever

Dans la cité Vallès, à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), c’est la galère quotidienne pour des milliers d’habitants. Entre les incendies qui se multiplient, les appartements pourris et une mairie qui fait la sourde oreille, la situation empire d’années en années. Ces dernières semaines, c’est une épidémie de légionellose qui vient encore enfoncer le clou. Mais l’ARS et l’OPHLM préfèrent jouer aux abonnés absents. Dans une ville où la majorité des habitants sont des prolétaires immigrés, le bailleur et la mairie laissent crever.

Une catastrophe sanitaire évitable

Le 24 décembre, les habitants de la cité Vallès sont tombés sur une affiche du bailleur, l’OPHLM d’Aubervilliers. Le message ? Stoppez les douches chaudes, l’eau est contaminée par la Legionella. Sur une petite affichette, l’on informe de la présence de cette bactérie qu’on trouve dans des endroits comme les centrales nucléaires ou des eaux stagnantes en pleine jungle tropicale.

La légionellose, ce n’est pas n’importe quelle maladie : elle se chope par les vapeurs d’eau et peut être mortelle, surtout pour les enfants, les anciens ou les fumeurs. Normalement, l’eau chaude sanitaire (ECS) doit être chauffée à plus de 50°C pour tuer la bactérie. Mais visiblement, à Vallès, l’entretien des tuyaux et le respect des normes, ce n’est pas la priorité, surement trop cher. Et c’est là que ça cloche : la Legionella adore les tuyauteries pourries et l’eau tiède. Ajoutez à ça un bailleur qui veut gratter des sous en baissant la température, et voilà le résultat : des centaines de locataires exposés à un danger mortel.

Les habitants pris au piège

Les tours touchées ? Quatre barres d’immeubles de plus de dix étages, soit plusieurs centaines de personnes potentiellement contaminées. Si le bailleur se souciait du danger, il aurait séparé les réseaux d’eau de chaque bâtiment. Mais pourquoi investir dans des travaux quand on peut faire des économies ? Encore pire : au lieu de couper l’eau chaude immédiatement, ils se sont contentés de coller un bout de papier dans le hall.

Cette situation rappelle la catastrophe des Tarterêts, en Essonne, l’année dernière. Là-bas, le bailleur avait caché une contamination pendant six mois. Résultat : un habitant de 27 ans en est mort. Un homicide par négligence.

« On se lave à l’eau froide et on galère »

Roberta* et son mari, qui vivent à Vallès, racontent leur calvaire : « Tous les matins, à 5h, je me lave à l’eau froide. J’ai quatre gamins qui ont besoin de se doucher. Quand on rentre du boulot, impossible de se laver correctement. Et l’eau chaude qu’on a parfois, elle pue le chlore. »

Imane*, une autre habitante, est tout aussi en colère : « Parfois, on a de l’eau chaude, parfois non. On n’a reçu aucune info de la mairie. C’est ma pharmacienne qui m’a expliqué ce qu’était la légionellose. Franchement, ils s’en foutent. Et pourquoi ils coupent pas l’eau directement ? Ça n’a aucun sens. »

Dans la presse locale, on apprend que le taux de bactéries dans l’eau est 120 fois supérieur au seuil d’alerte. C’est 12 000 fois au-dessus du seuil pour les personnes vulnérables. En attendant, le bailleur balance du chlore dans les tuyaux pour tenter d’éliminer la bactérie, mais sans dire clairement que cette eau n’est plus potable.

Trop, c’est trop : les locataires se mobilisent

Le mari de Roberta raconte : « Beaucoup sont partis au siège de l’OPHLM pour gueuler. On paie notre loyer, mais on n’a pas d’eau chaude. C’est simple, tout le monde pense qu’on devrait arrêter de payer. »

L’OPHLM a fait son boulot de gestionnaire capitaliste : réduire les coûts au maximum, peu importe les conséquences sur la santé et la dignité des gens. L’ARS et la mairie, dirigée par Karine Franclet, ferment les yeux, hormis des opérations de communication suite à l’intérêt suscité dans les médias. Quand on est prolétaire et qu’on n’a pas la bonne couleur de peau, on passe toujours après.

Mais face à cet abandon, les habitants s’organisent. À l’initiative d’habitantes, une pétition est signée par tous ceux à qui elle est présentée. À l’heure actuelle, l’eau chaude a été rétablie suite à un traitement des tuyaux. Mais dans l’un des bâtiments, l’eau chaude continue de couper par intermittence. Cette situation, en pleine vague de froid, nourrit la colère légitime.

Car si les institutions ne bougent pas, il ne reste que la solidarité et la lutte collective pour obtenir des conditions de vie dignes.

*Les prénoms ont été changés pour préserver l’anonymat des témoins.

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