Bilan public de la Campagne Unitaire – Georges Ibrahim Abdallah libéré : Quel bilan tirer de notre action militante ?

Pourquoi un bilan ?

Georges Ibrahim Abdallah est sorti le 25 juillet 2025 de la prison française où il était détenu ; dans la foulée, il a été expulsé par avion au Liban, son pays, dans lequel il est arrivé libre le même jour.

Nous, militantes et militants qui nous sommes engagé•e•s et avons agi collectivement pour exiger et gagner la libération de Georges Abdallah, nous avons jugé nécessaire de revenir sur cette expérience politique et d’en tirer les leçons utiles pour nos combats présents et futurs.

Ce bilan, nous le faisons en ayant connu – une fois n’est pas coutume – le succès de notre action, puisque l’objectif que nous nous étions fixé a été atteint. Bien entendu, nous ne pouvons nous glorifier du fait que Georges Abdallah a dû attendre la 41e année de sa détention, soit 26 ans après la fin de sa peine incompressible, pour être enfin libéré. Mais comme la justice française l’avait elle-même reconnu lors d’une de ses dernières audiences : Georges Abdallah était devenu « un prisonnier bien encombrant ». Et le jugement décidant sa libération justifia d’ailleurs celle-ci, entre autres, par le fait que son maintien en détention constituait « un trouble à l’ordre public en raison des nombreuses et régulières manifestations en sa faveur. » Pour sa part, notre camarade a eu ces mots : « S’ils ont accepté de me libérer, c’est grâce à cette mobilisation qui est ascendante. »

Nous sommes donc en droit de considérer que notre action a joué son rôle dans cette libération. Nous pouvons même légitimement parler de victoire politique – ou de bataille gagnée, quel que soit le terme choisi. Et si nous savons bien que cette victoire a été avant tout gagnée par notre camarade lui-même, dont la devise était d’ailleurs intangible : « La victoire ou la victoire ! », il nous incombe maintenant à nous, ses camarades, d’analyser et de comprendre les raisons de ce succès.

Ce bilan, élaboré collectivement et proposé par des militants ayant animé la Campagne Unitaire pour la Libération de Georges Ibrahim Abdallah (CUpLGIA) depuis sa création en 2015, relève selon nous d’un principe démocratique : nous nous devons, par respect des militant•e•s, de rendre des comptes à tou•te•s celles et ceux qui se sont engagé•e•s dans le combat commun. Notre bilan s’adresse ainsi aux camarades qui ont participé à cette lutte, certains depuis de longues années, d’autres depuis plus récemment.

Pour nous, faire le bilan de notre expérience politique commune est en soi une partie intégrante de cette expérience politique, une expérience politique qu’il est essentiel de transmettre : si nous assumons bien sûr l’action que nous avons menée, celle-ci ne prend tout son sens que resituée dans un processus historique bien plus long, qui exige de s’appuyer sur l’héritage des combats précédents. Toute lutte s’inscrit en réalité dans un combat de longue haleine : si elle doit se nourrir des expériences passées, elle doit pouvoir nourrir nos expériences à venir. Et toute bataille gagnée, même partielle, est ainsi un jalon pour les victoires futures.

Avant tout, nous nous devons de rappeler que nos pensées vont vers celles et ceux qui nous ont quitté•e•s avant l’heure de la victoire, mais dont l’optimisme de la pratique et les noms restent en nous bien présents et dont nous reconnaissons toute la part qu’ils et elles ont prise dans le succès obtenu : Joëlle Aubron, Suzanne, Catherine, Pierrot, Évelyne, l’autre Joëlle, Gilbert, Patrice, Gisèle, Yoann, Badia…

Libérer Georges Abdallah : de quel combat s’agit-il ?

Qu’est-ce qu’un prisonnier politique révolutionnaire ? Quelle solidarité avec un prisonnier révolutionnaire ?

Toutes les formes de solidarité avec des prisonniers révolutionnaires sont nécessaires et expriment des valeurs humanistes et de générosité respectables. Mais notre engagement solidaire pour la libération de Georges Abdallah ne se situe pas dans ce cadre et il ne se limite pas non plus à des arguments juridiques : même si l’agenda judiciaire rythme à différents moments notre action, elle ne peut se fonder sur le droit des tribunaux qui l’ont condamné, sur le droit bourgeois. En outre, défendre Georges Abdallah ne peut se limiter à des interventions ou des actions individuelles, mais doit être conçu comme une tâche collective, à prendre en main de façon organisée.

Nous déclarer solidaires de Georges Abdallah, ce n’est pas, pour nous, partager les épreuves d’un détenu. Nous considérons Georges Abdallah non pas comme une personne dont l’identité est celle de prisonnier, mais précisément comme un militant (actif) tombé aux mains de l’ennemi, un homme dont l’identité reste en détention celle d’un militant révolutionnaire, d’un militant communiste. Nous sommes solidaires de l’homme Georges Abdallah, parce que nous partageons son combat, notre combat commun pour l’émancipation humaine. Car, conscients du mouvement historique qui doit aboutir à la victoire des classes exploitées et des peuples opprimés, nous agissons pour développer la conscience dans les mouvements spontanés, afin de hâter le cours du processus historique. Nous ne pouvons donc être seulement les petites mains d’une solidarité généreuse et spontanée, mais nous devons utiliser notre lucidité pour porter au plus haut degré et de la manière la plus large la conscience, en nous fondant sur l’identité politique du camarade emprisonné, sur le sens de son engagement communiste, sur la clarté de son analyse scientifique des processus en cours.

Défendre Georges Abdallah, en être solidaires, c’est donc agir pour qu’il puisse, derrière « les hauts murs », continuer à jouer son rôle de militant aguerri dans l’agenda des combats contre l’exploitation et l’oppression. Avant tout, s’opposer à et rompre l’isolement politique que le système carcéral de l’État capitaliste entend lui imposer. Lui permettre d’abord de se tenir informé des luttes sociales, des mobilisations politiques, des mouvements de libération des peuples dont il est toujours un acteur essentiel. La Palestine au premier chef.

Nous considérons en fait le combat pour libérer Georges Abdallah comme une tâche centrale des révolutionnaires en France. Le camarade est détenu dans notre pays et il est donc avant tout de notre responsabilité à nous qui luttons ici d’agir pour sa libération. Parvenir à libérer Georges Abdallah, c’est réussir à porter un coup à notre ennemi, l’État bourgeois et son appareil répressif, c’est contribuer – dans une mesure certes limitée – à affaiblir la bourgeoisie capitaliste et impérialiste française. Et parce que nous sommes internationalistes et que nous considérons que le combat pour la libération de la Palestine est aujourd’hui central au niveau international, nous voyons la libération de Georges Abdallah, en tant qu’acteur éminent de la cause palestinienne, comme un devoir lié à cette tâche centrale.

Les premières années : le CLGIA

Répondant à l’incitation de camarades libanais en Belgique, le Collectif pour la libération de Georges Ibrahim Abdallah (CLGIA) est créé à Paris en juin 2004 par une poignée de militants français de provenances politiques diverses, mais tous conscients que seul le combat organisé et conséquent peut arracher les militants révolutionnaires aux prisons impérialistes. La première manifestation publique du CLGIA, en octobre 2004, jeta ainsi les bases de la campagne pour libérer le militant communiste libanais, le combattant de la cause palestinienne, détenu en France depuis 1984, et qui était libérable depuis cinq ans. Les demandes successives de libération avaient été l’une après l’autre rejetées et cet acharnement à le maintenir en prison avait clairement dévoilé que les décisions judiciaires le concernant avaient une raison foncièrement politique : briser un révolutionnaire, le contraindre au repentir.

Le CLGIA pouvait bénéficier de l’expérience acquise en France dans l’action du Collectif « Ne laissons pas faire ! » pour la libération des militants d’Action directe (AD). Le lien entre ces deux combats était d’ailleurs rendu évident par l’engagement de la militante d’AD, Joëlle Aubron, qui, ayant obtenu en juin 2004 une suspension de peine pour raison médicale, engagea ses dernières forces aux côtés du CLGIA. Sa participation au meeting de décembre 2005 fut en effet sa dernière apparition publique avant son décès le 1er mars 2006. Notons que ce meeting de soutien, tenu sous la présidence du militant communiste et ancien détenu torturé du colonialisme, Henri Alleg, entendit également une intervention de Soha Bechara, la résistante communiste libanaise détenue durant dix ans au sinistre camp de Khiam, au Liban.

La plate-forme publique du CLGIA mettait en avant le sens de l’engagement de Georges Abdallah, en tant que militant communiste révolutionnaire et antisioniste libanais. Cette compréhension du sens du combat de Georges Abdallah inspira toute l’action du CLGIA, une action politique pour faire largement connaître l’acharnement de l’État français, organiser la solidarité active avec notre camarade, expliquer le lien indissoluble entre son engagement concret contre l’impérialisme, le sionisme, la réaction et les luttes anticapitalistes et anti-impérialistes qui se déploient en France et ailleurs. L’acharnement de l’État français à le maintenir en prison montrait clairement que les décisions judiciaires le concernant avaient une raison foncièrement politique : anéantir un révolutionnaire, symbole vivant du militant communiste resté fidèle à son engagement et qui continuait à résister et à lutter dans la geôle de l’ennemi de classe. Le CLGIA entendait, par une action politique collective et organisée, briser le mur du silence construit pour abattre Georges Abdallah et faire de sa détention prolongée un problème politique largement public.

Le CLGIA s’est avant tout efforcé de faire entendre la voix de Georges Abdallah, en diffusant les déclarations politiques qu’il écrivait depuis la prison, notamment par le blog liberonsgeorges, aujourd’hui toujours actif. Il participa ou fut à l’initiative de nombreuses manifestations, souvent en dehors de tout cadre légal : devant la prison de Fresnes et, à partir de 2010, chaque année devant la prison de Lannemezan, intervention au Salon du livre de Paris, perturbation de réunions de campagnes électorales, occupation du consulat du Liban… Pour mobiliser toujours plus de forces, il organisa régulièrement des meetings, il installa des stands d’information lors de réunions politiques ou de concerts de soutien, il invita à des conférences de presse pour combattre le silence et les fausses informations des médias… Et, bien sûr, le CLGIA rendit visible dans la rue la cause de Georges Abdallah les 1er mai, lors des manifestations de solidarité avec la lutte du peuple palestinien ou pour la Journée internationale des prisonniers politiques révolutionnaires. La présence régulière d’un stand (non officiel) à la Fête de l’Humanité permit aussi de distribuer largement les tracts, affiches, cartes postales, autocollants de la campagne.

Pour accroître son audience, le CLGIA sut nouer des liens avec des collectifs militants de plusieurs villes (Lille, Bassin minier, Bordeaux, Lyon, Marseille…) qui participèrent de façon indépendante et coordonnée à la campagne. En 2012-2013, Georges Abdallah fut ainsi nommé citoyen d’honneur des communes de Calonne-Ricouart et Grenay (Pas-de-Calais), à l’initiative de maires courageux. Des contacts s’établirent avec plusieurs organisations politiques et le CLGIA développa en particulier de nombreuses coopérations avec les militants de la solidarité avec le peuple palestinien. Des personnalités répondirent souvent à l’appel du CLGIA : Georges Labica, Alima Boumediene-Thiery, Mireille Fanon Mendès-France, Alain Gresh, Jean-Pierre Bastid, Gabi Mouesca et bien d’autres.

Enfin, le CLGIA se lia à la Campagne internationale pour la libération de Georges Ibrahim Abdallah, lancée en avril 2010 à Beyrouth par une rencontre exceptionnelle franco-libanaise.

Pour répondre à la nécessité et à la réalité de l’élargissement du soutien à la cause de notre camarade, en France comme à l’étranger, le CLGIA a soutenu la création nécessaire de la Campagne Unitaire pour la Libération de Georges Ibrahim Abdallah (CUpLGIA) en s’intégrant dans son organisation.

La CUpLGIA : un saut qualitatif vers la victoire

Dix ans après sa mise en marche, la lutte pour libérer Georges Abdallah avait mûri. Les conditions étaient propices ; la volonté existait. Le développement nécessaire de la campagne exigeait de passer à une étape supérieure du travail militant. Il était devenu indispensable de coordonner plus encore les interventions des différents collectifs créés pour défendre Georges Abdallah ; pour progresser, il nous fallait mieux planifier les actions, développer notre propagande sous de nouvelles formes pour accroître notre audience, diversifier les initiatives pour élargir la base du soutien, fonder plus solidement la confiance dans la possibilité de gagner, intensifier de façon encore plus organisée la mobilisation.

Lancée en octobre 2015, à l’occasion de la sixième manifestation annuelle devant le centre pénitentiaire de Lannemezan où était détenu notre camarade, la Campagne Unitaire pour la Libération de Georges Ibrahim Abdallah (CUpLGIA) devint ainsi l’outil dont nous avions besoin pour réaliser ce saut qualitatif dans le développement de notre travail militant.

L’engagement pour l’objectif commun restait clair : exiger et obtenir la libération de Georges Abdallah, comme militant communiste inflexible, comme exemple de combattant anti-impérialiste, antisioniste et révolutionnaire, comme symbole de la résistance des prisonniers palestiniens dans les geôles de l’ennemi.

La Campagne unitaire enregistra ainsi des progrès réguliers, plus ou moins facilement atteints, matérialisés par la multiplication des initiatives auxquelles se ralliaient de nouvelles forces militantes : lancement de semaines d’action nationales et internationales, assemblées générales des collectifs de soutien, meetings centraux, manifestations nationales à Paris, organisation du déplacement en cars à Lannemezan, interventions dans les universités…

Depuis le début, nous savions des expériences passées et nous avions conscience que la lutte serait longue et qu’aucune impatience ne pourrait remplacer le patient travail militant accompli avec la certitude de la victoire. Tel était l’optimisme historique que nous assumions, en dépit de certains abandons ou de certaines attitudes de découragement, dans des circonstances ou aucune victoire immédiate ou rapide ne pouvait certes survenir. Notre optimisme historique, régulièrement vérifié lors de nos discussions, n’était pas subjectif, mais il se fondait sur la connaissance des processus objectifs et des lois qui les régissent. Georges Abdallah était un acteur clairvoyant de ces processus, celui qui nous démontrait que ce qui est nécessaire doit devenir possible par l’action consciente des militants.

De fait, par notre travail et par la compréhension des positions politiques de Georges Abdallah, nous étions préparés – sans doute plus que certains autres soutiens de la Palestine – à comprendre l’événement que représenta le 7 octobre, en tant qu’accélérateur de l’histoire. Certains d’entre nous avaient d’ailleurs participé durant plusieurs mois à la rédaction collective d’un opuscule dont le premier tirage parut en novembre 2023, sous le titre Résistance et combats pour la libération nationale de la Palestine, opuscule qui développait particulièrement l’importance stratégique de la lutte armée dans l’histoire du mouvement palestinien de libération nationale. Nous étions prêts, du même coup, à comprendre aussi comment le combat pour la libération de notre camarade, si étroitement lié au combat pour la libération de la Palestine, allait devoir alors changer d’échelle.

De la mobilisation pour Gaza à la libération de Georges Abdallah

Évidemment, nous ne pouvions prévoir la formidable éruption du mouvement de masse – de la jeunesse au premier chef – qui se mobilisa dès le lendemain du 7 Octobre pour défendre Gaza, qui allait subir la guerre génocidaire de l’entité sioniste. Bien sûr, cette mobilisation reflétait avant tout une émotion légitime face aux crimes sionistes, mais elle exprimait une condamnation sans appel de l’occupation et la conviction que « Palestine vivra, Palestine vaincra ! ». Loin de se sentir impuissants, les manifestants bravaient les interdictions de manifester un quelconque soutien à Gaza et la répression policière.

Bien sûr, nous ne pouvions prévoir toutes les potentialités que ce mouvement de masse aux caractéristiques uniques allaient développer. Mais nous savions – comme bien d’autres militants qui s’engagèrent complètement pour le faire grandir et l’affermir – que sa radicalité, son inventivité, sa clarté politique allaient favoriser des avancées rapides dans la prise de conscience d’une nouvelle génération libérée des freins posés par une partie des anciennes structures du soutien à la Palestine.

La Campagne Unitaire sut ainsi prendre toute sa place au cœur de la mobilisation pour Gaza, avec ses banderoles, ses drapeaux et ses mots d’ordre qui furent de plus en plus scandés par les manifestants. « Palestine vivra, Palestine vaincra, libérez Georges Abdallah ! » se fit entendre toujours plus fort dans les cortèges, tandis que les interventions de nos porte-parole depuis les camions des organisations alliées, membres ou non de la Campagne, rappelaient à chaque occasion le sens du combat de Georges Abdallah, sans aucune concession et sans jamais transiger avec des positions pacifistes ou pro-impérialistes.

Simultanément, sur les bases intangibles de la Campagne unitaire, de nouvelles sections de celle-ci se créaient dans une vingtaine de villes, afin d’accroître encore plus l’action organisée et coordonnée des militants. Les affichages, les meetings et les blocages dans les facs se multipliaient. Mais la Campagne Unitaire fut également présente dans toutes les mobilisations sociales et politiques, des protestations contre la répression au soutien à l’autodétermination du peuple kanak sous le joug de l’impérialisme français. L’écho de ces mobilisations se propagea à l’étranger dans de nombreux pays où des actions furent entreprises contre les représentations de la France. Au Liban, les autorités se devaient de réclamer officiellement à la France le retour de Georges Abdallah dans son pays.

Les manifestations, les rassemblements et les meetings organisés à l’initiative de la Campagne Unitaire dans les mois qui précédèrent la libération de notre camarade Georges Abdallah révélèrent clairement qu’un palier avait été franchi et que la bataille allait être gagnée. Et elle le fut, dans l’enthousiasme de toutes celles et tous ceux qui y prirent leur part, depuis le début vingt ans auparavant ou plus récemment, avec la même conviction.

Leçons et problèmes d’une Campagne

La Campagne Unitaire a toujours eu une vision collective du combat à mener. Celui-ci ne peut reposer sur une simple agrégation d’individualités. Le rapport correct de chaque militant de la Campagne au collectif est un facteur essentiel. Le principe responsabilité individuelle – contrôle collectif des tâches a toujours été privilégié qui soumet le travail de chacun au mouvement collectif.

La Campagne Unitaire n’est pas une organisation, mais elle se devait de se lier avec de nombreuses organisations pour faire progresser son combat. L’important était de ne pas faire preuve de sectarisme, tout en défendant fermement la ligne de la Campagne. Le but n’est jamais de sauver l’organisation en tant que telle, mais de préserver son orientation fondamentale.

La Campagne Unitaire n’est pas une organisation, mais son action est organisée en interne par ses militants de manière à la fois centralisée et démocratique. Ce fut une condition essentielle de son développement. Il arriva pourtant que dans certains cas quelques militants refusèrent d’appliquer les décisions prises en commun, émirent des critiques non fondées sur une pratique, voire prirent des initiatives préjudiciables au travail entamé. Faudrait-il élaborer des statuts limitant ces dérives ? Comment concilier l’arrivée de nouveaux militants avec la nécessité que le noyau le plus actif et le plus conscient puisse continuer à jouer son rôle ? Quelle unité de pensée et d’action trouver et conserver quand le degré d’implication dans les tâches collectives est variable ? Comment conserver en toute occasion un esprit de vigilance par rapport aux déviations internes et aux dangers venant de l’extérieur ? Tels sont les problèmes de fond que pose notre fonctionnement.

La question des axes de lutte et celle des mots d’ordre propres à chaque étape de la lutte sont des questions à prendre prioritairement en compte. Il fallait en particulier faire progresser l’idée de la légitimité de la violence révolutionnaire.

Le collectif s’est uni autour d’une plateforme qui définit précisément la ligne sur laquelle nous défendons Georges Abdallah. Cette clarté a permis de ne pas dévier sur des positions subjectives et de rester soudés sur ce socle commun.

Les fondements théoriques de la question palestinienne, comme question nationale à l’époque de l’impérialisme et comme mouvement de libération devaient constituer une base solide pour notre action, en reposant sur une analyse marxiste de l’histoire de cette question.

Le respect de l’identité communiste arabe du militant révolutionnaire Georges Abdallah a constitué un axe primordial, avec tout ce que cela implique : le soutien à l’action des FARL, à la résistance armée, à la résistance contre le colonialisme de peuplement de l’entité sioniste, base avancée de l’impérialisme occidental au Moyen-Orient, la dénonciation de l’État capitaliste et de l’impérialisme français. C’est ainsi qu’il fallait inscrire le combat de Georges Abdallah dans l’agenda des luttes et de la solidarité internationales, comme une partie intégrante des luttes anticapitalistes et de libération. Et, bien sûr, la cause de Georges Abdallah a constamment été reliée à la centralité de la cause palestinienne.

La solidarité avec les prisonniers révolutionnaires, avec Georges Abdallah mais aussi avec Ahmed Saadat et tous les prisonniers palestiniens dans les geôles sionistes est une tâche collective impérieuse à mener et à poursuivre.

La conviction de la possibilité d’une victoire dans cette lutte spécifique doit reposer sur l’expérience qui démontre que, dans la durée, la résistance et la mobilisation finissent par payer. Résister, continuer de résister, ce n’est pas un choix tactique propre à une étape de la lutte, c’est une stratégie et un processus historique. Georges Abdallah n’a jamais consenti à abandonner ses convictions, à renier son engagement politique, à renoncer à son identité de militant révolutionnaire : cette fermeté idéologique et politique dans des conditions si hostiles a été la clé de sa libération, une victoire qui est d’abord la sienne.

Un des facteurs de réussite dans l’élargissement de la mobilisation pour la solidarité avec le camarade GIA a été l’intense travail mené par la CUpLGIA en direction de la jeunesse, notamment dans les quartiers populaires et dans les universités : travail de transmission des expériences, mais aussi mise en pratique de nouvelles formes de lutte. Cet investissement, tout en contribuant à dynamiser la Campagne, a ouvert des perspectives fécondes pour la refondation du mouvement de la jeunesse sur des bases anti-impérialistes.

Sans doute pas la dernière question, mais nous nous devons de la poser : quel devenir pour la Campagne Unitaire après la libération de Georges Abdallah ? Comment assumer la victoire obtenue et en tirer un héritage ? Nous devons penser au prolongement de cette bataille gagnée, gagnée sur des bases révolutionnaires, anti-impérialistes, de soutien à la résistance palestinienne et à sa lutte de libération nationale s’appuyant sur la violence révolutionnaire comme moyen principal.

Ce bilan militant de la Campagne Unitaire pour la Libération de Georges Ibrahim Abdallah est destiné à être discuté avec des camarades avec lesquels nous devons penser par exemple à la possibilité, voire à la nécessité, de construire sous une autre appellation une structure organisée qui pourrait être un nouveau front de combat contre le capitalisme, l’impérialisme, le sionisme et toute la réaction, et en défense aux prisonniers révolutionnaires en général et en particulier aux prisonniers palestiniens et libanais, vers de nouvelles victoires populaires…

Octobre 2025

Campagne unitaire pour la libération de Georges Ibrahim Abdallah

Voir aussi

Dernières actualités de la lutte