Éditorial n°82 : Renaissance, lutte entre le nouveau et l’ancien

Le mouvement Septembriste, à défaut d’avoir pris dans la rue, a déclenché toute une production d’analyses plus ou moins justes sur le pourquoi de l’échec. C’est un fait indubitable : malgré tous les efforts déployés, toute la foi militante, les dizaines d’assemblées populaires à travers le pays, le 10 fut un pétard mouillé. Non seulement l’électricité du 10 ne s’est pas propagée les jours d’après, mais l’arrivée de la monstrueuse intersyndicale a fait muter la motivation et la détermination en désarmante « journées de mobilisations ». Les masses populaires n’ont pas rejoint massivement le mouvement, à la hauteur de l’attente, c’est un fait, et ce malgré un fort appui. Le dispositif policier a bien sûr joué son rôle ; déployer 80 000 flics fait tergiverser une partie de la population. Le mouvement des Gilets Jaunes fut en son temps brisé comme cela. Que dire des politiques et médias serviles, qui ont rabâché pendant des semaines que le mouvement était usurpé par l’ultra-gauche ? Dans une France en chute libre, où les masses populaires sont submergées par une propagande bestiale et continue, les normes tendent à s’inverser, nous devons le prendre en compte.

Il est important d’opposer à tout cela un « peu importe ! » : le 10 victorieux sera pour la prochaine fois, la lutte des classes s’accélère à peine, la situation politique est tendue, la crise économique et sociale se développe, l’État bourgeois se réactionnarise, la tendance est au développement de la révolution.

Les analyses de gauche ont déjà fait le travail d’étaler le côté de la contradiction qui met en avant l’échec. Nous ne pouvons que mettre en avant le positif de ce non-mouvement, même si nous voyons les deux aspects de la contradiction.

Pour commencer, la grande vague démocratique d’organisation à la base dans les Assemblées populaires est un des événements marquants de cette séquence. Jamais un mouvement n’avait été préparé avec autant de force à l’avance. C’était l’inverse d’un mouvement spontané : il était un minimum structuré, organisé, planifié, et c’est pour cela qu’il a inquiété les seigneurs d’en haut et qu’il a même engrangé de belles victoires avant même son début avec le départ de Bayrou. Le mouvement a même forcé la direction de la CGT d’être du bon côté de l’histoire, avant qu’une fois encore elle soit kidnappée par la monstrueuse intersyndicale. Qui peut oser dire que ces faits ne valent rien, mis à part quelques intellectuels spécialistes de la critique attentiste, spécialité ô combien française !

Dans son essence, l’échec de ce mouvement reflète simplement l’impérieuse nécessité de l’organisation politique révolutionnaire pouvant coordonner et diriger les larges masses en action. Les commentateurs se sont accordés sur le problème de dispersion, sur la difficulté de coordonner plusieurs endroits d’actions dans une seule ville, et bien sûr dans le pays, dans des moments intenses où tout est mouvant. Ces mêmes commentateurs ont activement participé à la défaite avec leurs « bandes affinitaires » localisées, bloquées idéologiquement, perdues politiquement, n’ayant qu’une vision du « mouvement pur », sacralisant le spontanéisme sans jamais proposer un autre horizon que la défaite.

En face l’État bourgeois déplace, concentre, garde en réserve, manœuvre ses troupes avec une aisance telle qu’imposer la surprise, dans l’état actuel des choses, est devenue difficile. Pour massifier, les points de blocage du 10 ont souvent été publiés, et ça a logiquement permis à la répression de s’organiser car la police aussi lit les journaux, les sites internet et les canaux Telegram. Ce n’est plus donc une question quantitative, les masses qui veulent lutter sont là par centaines de milliers (tant les premières assemblées étaient grandes) et par millions, mais qualitative. L’époque nécessite un bond qualitatif que seul le Parti Communiste, État-major de la révolte et des révoltés, va offrir car c’est le sens de l’Histoire. Une centralisation stratégique (militaire) et politique (dans les buts à atteindre) du mouvement, alliée avec une décentralisation tactique de l’action laissant s’adapter aux nécessités locales les formes de luttes, c’est le seul chemin vers des mouvements qui triomphent.

Il est donc juste d’affirmer que le principal fait, celui qui transcende tout le reste, ce sont les forces révolutionnaires, mues par le but du Communisme, qui ont montré leur grande capacité d’organisation, de direction, de moteur dans les mobilisations, où elles étaient présentes. Pour la première fois depuis des décennies, l’anarchisme et le trotskysme ne dominaient pas la scène. Cela a bien sûr créé beaucoup de frustration entraînant même des actes de malveillance de leur part, mais surtout, l’immense espoir pour les révolutionnaires de sortir de la spirale de la défaite.

Ce qui est le plus marquant, c’est qu’il y a une volonté aujourd’hui d’organisation politique de la nouvelle génération de jeunes. Il y a toujours la contradiction entre le besoin d’organisation et le rejet petit-bourgeois de l’organisation, mais la tendance est à son dépassement. C’est un fait qui exprime le retour de la lutte des classes, du sérieux, et qui reflètent la situation révolutionnaire en développement inégal en France.

Nous vivons la renaissance du Mouvement communiste, certes encore quantitativement faible mais qualitativement au-dessus de n’importe quel type d’organisation. Le processus de reconstitution de la Jeunesse Communiste qui vient d’être annoncé lors de la fête de l’Humanité est un nouveau pas dans cette renaissance. Le mouvement Septembriste a permis d’accumuler de nouvelles forces, mais bien plus encore de forger une jeunesse à la direction et à l’organisation scientifique de la révolte.

Toute notre époque exprime une lutte entre le nouveau, la renaissance du Mouvement communiste, et l’ancien, les vieilles formes de (non) organisations qui se sont développées sur le cadavre de l’ancienne séquence de lutte. Le rejet du pacifisme, de l’opportunisme, de l’attentisme, la volonté de combattre dès maintenant l’impérialisme, le capitalisme, la réaction, est ce qui anime la jeunesse du nouveau siècle. La lutte pour que triomphe le nouveau est avant tout une lutte subjective, une lutte pour l’organisation des forces qui désirent en acte la révolution. Une force irrésistible est en train de se développer autour de la nouvelle génération de révolutionnaires qui ont décidé de donner leur vie pour la révolution dont le premier acte est la reconstitution du glorieux Parti Communiste. Chamboulant leurs vies, leurs projets, acceptant la rude transformation de leurs âmes, rompant matériellement avec la vieille société, la jeunesse, la plus belle qu’ait connu la France depuis des décennies, est en ordre de bataille dans les usines, les quartiers populaires, dans les universités, partout où la souffrance et la misère capitalistes imposent leur règne. Le Communisme, la plus belle passion de cette nouvelle jeunesse, donne une force matérielle et morale indestructible, le moteur au mouvement perpétuel vers le règne de la liberté.

Voir aussi

Dernières actualités de la lutte