Depuis les accords de Nouméa, en 1998, le corps électoral est gelé en « Nouvelle-Calédonie » (Kanaky). Cela signifie que seuls les inscrits sur les listes en 1998 (et leurs descendants) peuvent voter, ce qui empêche la submersion électorale des Kanak.
En proposant le dégel du corps électoral, le gouvernement français incarné par Darmanin met le feu aux poudres en attaquant une des revendications obtenues dans la lutte de plusieurs décennies contre l’État français.
Le 13 mai 2024, à l’appel de la Cellule de coordination des actions de terrain (CCAT), la population kanak se soulève, réclamant l’abrogation de la loi. Des barrages sont érigés. La jeunesse kanak affronte héroïquement les gendarmes armés, les blindés, la répression sauvage de l’État français, et paie le prix du sang. Douze insurgés sont tués par la police et les milices coloniales, pour une population kanak, mélanésienne, métisse et asiatique (subissant de plus en plus le racisme et la mise à l’écart, et donc de plus en plus favorable à l’indépendance) de moins de 150 000 personnes, dans un pays où « tout le monde se connaît ».
À l’occasion de l’anniversaire de la révolte, les Comités solidarité Kanaky (CSK) de toute la France organisent des manifestations. À Lyon, les militants du Mouvement kanak de France (MKF) et le CSK décident d’organiser une marche partant des Terreaux pour aller à Bellecour. Le MKF et les militants de la Ligue de la jeunesse révolutionnaire (LJR) décident de prendre en main l’agitation, avec des distributions de tracts et des animations au premier mai, mais également des collages d’affiches ainsi que le déploiement d’une banderole sur un pont, avec un immense drapeau Kanak et des fumigènes.
Cette marche est conçue par le CSK comme permettant de mettre en lumière l’emprisonnement des 7 militants de la CCAT, dont le dirigeant du Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS), Christian Tein. Comme l’a affirmé un membre de la Campagne unitaire pour la libération de Georges Abdallah, qui appelait à un cortège pour la libération de Georges Abdallah et de Christian Tein, c’est une « marche pour exiger la libération de camarades anti-impérialistes ».
Dans des prises de paroles, souvent émouvantes, les militants du MKF racontent les révoltes de mai et juin 2024, la violence des milices racistes et l’héroïsme de la résistance populaire. Ils mettent en avant le sort des 82 prisonniers de droit commun, qui se retrouvent déportés pour faire de la place « au pays ». Ces prisonniers sont donc à 17 000 km de leur famille et se retrouvent isolés en métropole, sans assurance-maladie (qui n’est pas la même en Kanaky), à leur sortie.
La manifestation se fait dynamique et les militants kanak prennent de l’assurance. Elle se disperse finalement sur les quais du Rhône, au milieu de la musique. En effet, les organisateurs racontent aux activistes du Comité de soutien qu’au pays, la manifestation se fait en musique, chants et danse, avec très peu de slogans et de prises de parole politiques. C’est dans une ambiance festive que se finit l’évènement, qui mélange la diaspora kanak, les militants révolutionnaires et activistes pro-palestiniens. Selon les militants du CSK, c’est une grande victoire politique, qui met en lumière la cause des militants enfermés de la CCAT.