Le 12 décembre 2021, l’Etat français organisait le 3ème référendum « sur l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie », dans le cadre de l’accord de Nouméa. Cet accord est signé en 1998 entre le gouvernement de Lionel Jospin, les anti-indépendance du « Rassemblement pour la Calédonie dans la République » et le Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS). Il prévoyait trois référendum sur l’indépendance de la Kanaky (nom donné par les indépendantistes à leur archipel).
Deux de ces référendums avaient été organisés ces dernières années, aboutissant en 2018 à 43% de oui pour 56% de non, et en 2020 à un score plus serré de 46% pour le oui contre 53% pour le non. Cette année pourtant, le résultat est sans appel : 96% contre l’indépendance. Comment expliquer cela ?
C’est que cette année, tout a été différent. Le FLNKS, force politique majeure de l’archipel et notamment de Province Nord, a appelé au boycott du scrutin. Malgré ses trahisons politiques et son alliance avec les sociaux-démocrates français, le FLNKS conserve une grande influence comme le front qui a mené le plus loin la lutte pour l’indépendance. C’est contre ses membres les plus déterminés que l’État français a utilisé de la violence contre-révolutionnaire et coloniale, comme le massacre de la grotte d’Ouvéa. En 1988, les gendarmes prennent d’assaut la grotte où sont retranchés des militants armés du FLNKS. Sur ordre direct de Chirac, alors Premier Ministre, les officiers français se livrent à des assassinats de sang-froid et à un massacre dans la grotte, tandis qu’aucun otage n’avait été tué par les indépendantistes. Cet exemple n’en est qu’un seul parmi d’autres : depuis les « Événements » (1984-1988), le FLNKS reste une référence de la politique locale.
Alors lorsqu’il appelle au boycott, cela produit des effets. Il est rejoint par les autres forces indépendantistes, qu’elles soient alliées ou plus radicales : c’est le cas de l’Union calédonienne (UC, alliée), de l’Union nationale pour l’indépendance (UNI) et du Parti Travailliste (PT). Les raisons de cet appel au boycott reposent principalement sur la crise sanitaire, et pas sur des arguments politiques. Ce n’est pas un retour à la politique de boycott actif qu’avait le mouvement révolutionnaire indépendantiste il y a quelques décennies.
Malgré cela, l’État français a maintenu son référendum, avec pour objectif de boucler ce dossier avant l’élection présidentielle de 2022. Plus de 2 000 gendarmes ont été déployés dans les rues de l’archipel, un nombre disproportionné en rapport avec les risques de heurts, qui n’ont pas eu lieu. Au final, 56% de l’électorat de ce référendum s’est abstenu, une grande majorité. Dans les Îles et la Province Nord, l’abstention s’élève à 95% et 83%. Macron a malgré tout déclaré avec joie : « La Nouvelle-Calédonie restera donc française. ». Suivi par toute une tranche de politiciens, Zemmour, Pécresse etc, qui se sont félicités de ce résultat.
La lutte du peuple kanak ne s’arrête pas avec cet enchaînement de référendums. Avec la fin du cycle de Nouméa, ce sont des nouvelles réponses qui attendent les indépendantistes, qui doivent prendre en compte l’échec de la stratégie de conciliation.