On entend souvent dire, chez les gens les plus critiques de la société en place, que Noël est une fête commerciale. Pour beaucoup de camarades, Noël serait une fête produit du capitalisme et donc une fête à abattre. Même si l’origine de Noël est bien plus ancienne et se situe dans les fêtes païennes (et même probablement dans des célebrations plus anciennes encore) pour le solstice d’hiver, le jour le plus court de l’année dans notre hemisphère, le Nöel que nous connaissons, avec les cadeaux, n’a pris son impulsion que depuis plus d’un siècle, et est effectivement un produit de la société bourgeoise.
Mais, pour autant, Noël est-il une fête à abattre ? Il faut noter que dans les sociétés humaines, tout, d’abord, se transforme, et tout, ensuite, a un double aspect. D’une fête chrétienne féodale, religieuse avant tout, Noël est devenu une fête de famille, ou l’on s’offre des cadeaux et ou l’on réunit toute la famille, en etant parfois la seule occasion de l’année pour cela ; et l’on voit de plus en plus de groupes soudés d’amis fêter Noël ensemble, avec la tradition du « père Noël secret » qui existe dans de plus en plus d’endroits, consistant à tirer au sort une personne recevant notre cadeau, avec chaque personne offrant et recevant un cadeau. Si Noël a un aspect capitaliste, avec en particulier l’achat de denrés jetables, la sur-consomation (nourriture et en particulier viande issue d’abattoirs, forêts de sapins détruites et replantés chaque année, cadeaux jetables, parfois revendus dès le 26) avec un rapport capitaliste à la production et à la nature, il est totalement repris en main par les masses.
A Noël, on aime donner. Beaucoup d’ouvriers et d’ouvrières, de parents en particulier, font de nombreuses heures supplémentaires pour pouvoir offrir de beaux cadeaux à leurs enfants. Il y a bien sûr la rivalité avec les autres, l’esprit de compétition malsain, à celui qui sera moqué car « pauvre », avec des mauvais cadeaux. Mais il y a surtout une volonté, à l’opposé du misérabilisme de la gauche et de l’extrème gauche petite bourgeoisie, d’être fier de son travail. A Noël, on expose sa fierté de travailler. On expose sa fierté de s’en sortir « même si ce n’est pas tous les jours facile ». On est heureux de faire des sacrifices mais de montrer que ce n’est pas un soucis. Là dedans, il y a un esprit socialiste. Notre travail est nécessaire et, d’une certaine façon, Noël nous permet de reprendre en main une part même infime de notre travail. Ce don, c’est aussi la preuve de la fidélité à un groupe, à une famille. Bien sûr, il y a un coté tribal, « les miens avant les autres », qu’on peut regretter. Mais tant qu’il n’y aura pas de grande organisation de la classe ouvrière, la fidélité, valeur suprême de notre classe, restera au groupe proche. Noël a montré cela en 2018 chez les Gilets Jaunes. C’est aussi la fidelité envers les anciens, ceux qui ont tout donné à la société, à la famille et à la classe.
Noël est donc une fête traditionnelle, impregnée par la production capitaliste, qui l’a forgé. Mais dans cette fête de Noël, il y a une réapropriation populaire, il y a des valeurs forgées et défendues par notre classe, une volonté de donner, de se réapproprier la travail. La tradition, ici, n’est pas réactionnaire ; la tradition est une part de l’identité populaire ; celle de la fierté de vivre de son travail, celle du bonheur de vivre avec un groupe, celle de la bouffe tous ensemble. En ces temps d’épidémie, nous respecterons tant que nous le pouvons les restrictions sanitaires, malgré la méfiance envers les institutions et l’absurdité de mesures sanitaires floues et incohérentes. Mais nous ne pouvons vivre les uns sans les autres et nous nous déplacerons malheureusement en nombre pour célebrer cette grande fête populaire ; malgrè tous les risques.
Faites vous tester tant que possible, évitez les grands rassemblements, prennez soin de vous et de vos proches. Camarades, joyeux Noël et bonnes fêtes à tous et toutes.